A poil les poules ! épisode 4/5

Publié le par grand guide suprème

 

 

Le lendemain, personne ne reparle de notre balade nocturne. Le surlendemain, quand Sonia, la femme d'Oliver, vient boire un thé, aucune remarque en forme d'aileron de requin ne vient affleurer à la surface de la mer de la conversation. Comme si on avait fait table rase du passé et qu'on avait mis une petite nappe à fleurs dessus.

 

Deux semaines plus tard, Oliver arrive seul. Tard. L'air fatigué. Je vois Seb qui frémit. J'ai un mauvais frisson qui me secoue l'échine comme une sorte de révolution culturelle intérieure. Oliver a du mal à vider son sac, au sens figuré pour le moment, mais on a tous senti (sauf Manu, bon) qu'il avait un autre sac, au sens propre celui-là, enfin pas propre-propre non plus. On a une discussion qui ressemble à une autre discussion qu'on avait tous voulu oublier. La terre sur la pelle est encore fraîche, ou alors c'est Nathalie qui a planté des carottes.

 

La semaine d'après, Oliver vient tous les soirs. On enterre des vieux, des jeunes, des femmes, des hommes. Un soir, on commence même à se dire qu'on a déjà planté quelqu'un par là. Oliver est notre ami, c'est aussi un assassin, et là en fait c'est un tueur en série. C'est la merde. Personne ne parle plus à personne. On attend le soir avec inquiétude. On regarde la bêche comme si elle avait des pensées impures. On sent bien qu'on ne peut pas demander à un tueur en série pourquoi il tue, on n'est pas flic, on est ses amis. Comment on l'aiderait, à part en faisant ce qu'on fait ?

Pendant deux jours, on ne le voit pas. On soupire un peu, on se remet à blaguer, Manu se recouche à 21h30. On refait du jardinage classique. Ça fait du bien de planter des légumes plutôt de la viande froide, ça change le menu.

 

Et puis Oliver revient. Seb gueule un peu, parce que ça fait quand même du boulot, mine de rien, et qu'il a le sommeil un peu perturbé et qu'il n'aime pas trop ça. Manu exige de voir la carte parce que ça lui paraît bizarre, cette histoire de trésor introuvable qu'on va chercher toutes le nuits en ce moment. Oliver ne répond pas,il reste les bras ballants, il a l'air fatigué. Je le prends par l'épaule, il me prend par les sentiments. On part finalement tous les deux faire notre petit trou normand, et Manu nous rejoint. Pas Seb. Curieusement, le fait qu'on soit plus que 3 à creuser au lieu de 4 a l'air de plus me gêner que le fait d'être ami avec un tueur en série. Quand on rentre, on est tout sale, Nathalie est toute pâle et Seb râle.

 

C'est là que je pense à ce que ce sacré Bobby dit souvent : « mourir, c'est emprunter le vélo du destin et en faire sur une roue et une route mal éclairée de nuit sans phare. »

 


Publié dans Dieu et la Sorcellerie

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L
je commence a m'inquiéter de la tournure que prennent les évènements...
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