Clearstream et vieilles dentelles.

Publié le par grand guide suprème

 

 

                       Le petit cul de Seb le Mak épousait mollement les formes d’une chaise en bois, dans un rade qui sentait bon les pieds mouillés et le saucisson sec, le tabac froid et les filles chaudes, quelque part dans un quartier où les poules ont des dents et des minijupes. Seb regardait fixement un paquet de spéculos posé sur la table. N’importe quel client se serait demandé lequel des deux allait manger l’autre, s’il y avait eu des clients.  Le suspense était intense. On était à 0 sur l’échelle de Richter.  Le patron moustachu du bar but un blue gin (curaçao-gin-liquide de refroidissement) et rejoignit notre héros.

 

« -Hola », espagnolit Seb le Mak qui parlait 15 langues avec aisance  et l’accent cauchois.

«  - Esto possiblé de parlaré con tu duo minouti ? » répondit le barman.

« -  Porqué muchacho ?

- Oune poquito problémo, companiéro…

- Ah », répondit Seb. « Una cerveza, per favor », ajouta-t-il à regret. Il aurait préféré un café, mais ne savait plus comment ça se disait.

« - On pourrait causer de tout ça en français, ce serait plus clair, hein ? » demanda le barman.

« - Moi, je suis comme le caméléon, je m’adapte. Je change de langue à chaque fois que je bouge de bouche », énigmatiqua le Seb.

« - T’as des amis qui…

- Oh la oh la, j’ai pas d’amis. Je connais des gens qui me connaissent, c’est tout. Il y en qui donneraient leur chemise pour moi, mais elle est trop grande, souvent. Ou les couleurs sont moches.

- OK. T’as des connaissances qui pourraient bien perdre connaissance, si tu vois ce que je veux dire. »

 

                       Une demoiselle à peine vêtue  d’une jupe qui laissait voir des formes formidables s’assit sur la cuisse de Seb. Elle lui susurra à l’oreille : « le tracteur est garé sur le parking. » Ca ne voulait pas dire du tout qu’elle avait senti l’érection galopante qui gonflait le pantalon de Seb, ça voulait juste dire que le tracteur était garé sur le parking. Les filles que Seb protégeait ciblaient une clientèle bien particulière : les agriculteurs biologiques lourdement endettés. Elles se faisaient payer en nature (10 tonnes de blé, 5 moutons, 250 œufs, 150 kilos de betteraves) et lui revendait le tout sur des marchés. Ou laissait tout pourrir dans le garage de chez Sherpa, garage vide depuis que le guide avait échangé sa voiture contre trois escargots bio.

 

                       Une autre pensionnaire de la Seb Académie se posa sur le genou disponible. Seb n’était plus tellement à sa discussion avec le patron du bar, Bapapa. Il roulait des yeux comme si ça avait été des billes dans un shaker. Ses dents claquaient les premières mesures de « Starway to heaven » de Led Zeppelin. Il bavait un peu et ses cheveux se dressaient sur sa tête comme s’il avait mis les doigts dans la coke. Son cœur faisait vibrer sa chemise, sa bite faisait trembler son futal. Il était agité de tremblements qui auraient foutu le tournis à Haïti. Une des filles entra sa langue dans son oreille, ce qui lui fit sortir les yeux de la tête. L’autre fille fit pareil, et les divers morceaux de son corps disséminés aux 4 coins de la planète furent secoués de spasmes. Le patron du bar le secoua.   

 

« -T’as des potes en danger. »

Seb ne semblait pas l’entendre. Seul le doux feulement des deux filles lui parvenait en stéréo.

« - Oh ! Tout à l’heure, tu as laissé traîner ça ». Le barman claqua sur la table la photo de Villepin découpé en rondelles, qui resta entre Seb et lui comme le mur de Berlin entre les deux Allemagnes, sans les miradors. Le barman poursuivit : « Tu sais, je ne suis barman qu’à mi-temps, je suis aussi analyste politique sur Radio Vallée de la Lézarde. A ton avis, qu’est-ce qui lui est arrivé ?

- Il s’est coupé en se rasant ? » hasarda Seb.

« - Oh ! On discute sérieusement, là, petit », dit-il en collant une claque qui fit chpoc sur la joue de  Seb.

« - Ben, la compote, la tête de veau, les mots tracés qui accusent Jacques C., c’est un coup de Jacques Chirac !

- Ah…. Et qui est le plus redoutable adversaire de Sarko pour 2012 ?

- Ben les verts ? » tenta Seb.

« - Sérieux, on a dit ! » répliqua le barman en lui mettant un taquet.

« - Ben je sais pas. Les socialistes ? » Seb reçut un coup de pied dans les tibias qui les bleuit sur le champ. « Ouille ! Je sais pas, moi, Villepin ?

- On y est.

- Donc, c’est Sarko qui aurait fait le coup en faisant croire que c’est Chirac ? » s’écria Seb dont le visage s’illumina comme un sapin de Noël directement branché sur une centrale nucléaire.

« - Ca, c’est ce que ceux qui ont fait le coup veulent faire croire ». Le visage de Seb se referma comme une huître qui voit passer  un citron et des tartines de beurre. « La politique, c’est des tordus, qui font des coups tordus. Ce que je voulais te dire depuis le début, c’est que, la nuit où Villepin s’est fait dévillepinisé, j’ai vu de mes propres yeux Maître Yoda, François Hollande et Martine Aubry dans le cimetière où sont enterrés Raymond Barre et Philippe Seguin. Et Maître Yoda portait un masque de Sarkozy. »

 

                       Seb aurait préféré que ses oreilles servent de perchoir à la langue des deux filles plutôt que de boîte aux lettres à ces révélations incroyables. Il prit un stylo et entama lentement un schéma pour bien tout expliquer à Bobby et à Prof. Le barman le mit dehors d’un maître coup de pied au cul et lui cria : « Ca urge ! Va retrouver tes potes ! Si tes explications ne sont pas claires, reviens, je te les tatoue sous les ongles ! »

 

 

 

 

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